Gabriel Leger
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FILS DE LA TERRE ET DU CIEL ÉTOILÉ
Un avion de laiton plié vole de la nuit vers le soleil. Lancé dans l’obscurité en éclaireur, il porte un message secret tapé à la machine en grec sur sa surface: d’antiques instructions venues des initiés orphiques (VIe s. avant J-C) pour, après la mort, trouver le bon chemin dans un paysage piégé, et ainsi bloquer le cycle des réincarnations.
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A folded brass plane flies from the night towards the sun. Launched into the darkness as a guide, it carries a secret message written by a type machine in Greek on its surface: ancient instructions from the Orphic Initiates (6th century B.C.) to find the right path in a trapped landscape after death, and thus block the cycle of reincarnations.
LES VASES COMMUNICANTS
Sur les plateaux d’une balance scientifique sont posés deux flacons à l’apparence similaire, et sans contenu. Il y a pourtant à l’intérieur un vide et un plein: à gauche, de l’air inspiré, à droite de l’air expiré par l’artiste. Entre ces deux actions s’est passé une année.
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Two empty bottles with similar appearance are placed on the plates of a scientific scale. There is nevertheless a both empty and full side: on the left, inspired air, on the right, air exhaled by the artist. A year took place between these two actions.
LA PLURALITÉ DES MONDES
Ce livre de l’abbé de Fontenelle est un essai de vulgarisation des avancées astronomiques de son époque, entre autres l’héliocentrisme et la possibilité d’autres planètes habitées. Sur sa gravure en frontispice, illustrant l’argumentaire par un grand tissu couvert de corps célestes, deux dés ont été jetés. Le cornet à dés placé sur le côté nous invite à continuer les lancers de ce jeu de divination totalement à l’opposé de ce que le livre défend. Une sorte de cohabitation d’astrologie antique et d’astronomie moderne.
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This book by the Abbot de Fontenelle is an attempt to popularise the astronomical advances of his time, including heliocentrism and the possibility of other inhabited planets. On the frontispiece engraving, illustrating the thesis with a large cloth covered with celestial bodies, two dice have been thrown. The dice shaker on the side invites us to continue the throws of this divination game, as an opposition of what the book defends. A sort of cohabitation of ancient astrology and modern astronomy.
NOX
Un drap teinté en bleu de prusse constellé de points blancs est accroché au mur avec une lampe de mineur. Figuration d’une nuit étoilée, NOX est un photogramme réalisé en cyanotype (voir SEULS SIGNAUX): des cailloux ont été jetés au hasard sur le tissu enduit de solution sensible, exposé ensuite au soleil. Ces pierres fines, presque poussières, qui ont servi à représenter les étoiles proviennent d’un chemin où a marché Galilée au moment de sa fameuse abjuration de 1623. La lampe quant à elle reflète la quête humaine d’un feu plus fort, recherche dans la nuit d’une lumière vers une autre.
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A sheet dyed in Prussian blue spotted with white dots is hung on the wall with a miner's lamp. A representation of a starry night, NOX is a cyanotype photogram (see SEULS SIGNAUX): pebbles have been randomly thrown onto the cloth coated with a sensitive solution, then exposed to the sun. These fine, almost dusty stones, which were used to represent the stars, come from a path that Galileo walked at the time of his famous abjuration in 1623. The lamp reflects human’s quest for a stronger fire, a search in the night from one light to another.
THE NAME OF GOD
Une voix enregistrée sur bande magnétique égrène l’intégralité des noms figurant sur une carte de l’Inde. Une nouvelle de J-L Borges (Le miracle secret, 1943) avance que Dieu se trouve dans l’une des lettres d’un des noms d’une carte de l’Inde. Cette proposition peut être prise littéralement: les noms ont donc été scandés comme un mantra, transformant ainsi une carte en texte sacré.
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A voice recording on a magnetic tape lists all the names on a map of India. A short story by J.L. Borges (The Secret Miracle, 1943) suggests that God is in one of the letters of one of the names on a map of India. This symbolic proposition can be taken literally: the names were thus chanted like a mantra, thus transforming a map into a sacred text and its listening into mystical experience.
À L’INTÉRIEUR DE LA VUE
Les oracles se consultent les yeux fermés: pour voir loin, ou autrement, il faut donc ouvrir d’autres yeux, de cristal ceux-là.
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Oracles are consulted with closed eyes: to be able to see far, or in another way, one must open other eyes, those of crystal.
THE WINDING PATH
Une bobine de fil au fond d’une boîte ouverte nous présente trois histoires. La première nous amène en Égypte antique dans la Vallée des Rois, où dans une tombe a été déposé ce fil; la deuxième en 1865, quand l’archéologue Gaston Maspéro entre dans la tombe et trouve la bobine. La dernière est la nôtre, à tisser ou à coudre à l’aide de l’aiguille des contes.
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A spool of thread at the bottom of a box presents three stories. The first takes us to Ancient Egypt in the Valley of the Kings where the thread was placed in a tomb. The second took place in 1865 when the archaeologist Gaston Maspéro entered the tomb and found the spool. The last is our own: a story to weave or to sew with the help of the needle of the tales.
CARRÉ JAUNE SUR FOND JAUNE
Réponse symétrique au carré noir sur fond blanc de Malévitch qui proposait de libérer la peinture, l’art et la vie en passant par le « rien » d’un trou noir, ici ce carré offre à se perdre dans un autre espace, lumineux celui-là. Couleur du soleil et n’existant que par lui, le miel dont est fait cette nouvelle icône n’est-il pas, tout comme elle, transmutation de la matière par la lumière ?
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A symmetrical response to Malevich's black square on a white background which proposed to liberate painting, art and life by passing through the “nothingness” of a black hole, here this square allows us to lose oneself in another, luminous space. As the colour of the sun and existing entirely because of it, isn't the honey from which this new icon is made, like the sun, a transformation of matter by light ?
L’ESCALIER DE JAÏPUR
Un polyèdre de cire mène à un tracé en forme d’ouverture réalisé sur le mur même. Cette maquette d’architecture symbolique fait écho à celle d’un observatoire construit par le Mahârâdja Jai Singh II en 1727, dont la construction extraordinaire ressemble plus à un temple qu’à un bâtiment à usage scientifique. Comme à Jaïpur, les choses ne ressemblent pas toujours à ce que l’on croit savoir: ici l’escalier est sans marches, et la porte n’est qu’un tracé. Le nom originel de l’observatoire est Yantra Mantra, « le Temple des Formules » : de celles qu’il faut connaître pour monter sans difficulté une rampe de cire et ouvrir la porte des étoiles.
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A wax polyhedron leads to an aperture-shaped drawing done directly on the wall. This model of symbolic architecture recalls an observatory built by Mahârâdja Jai Singh II in 1727, whose extraordinary construction resembles a temple more than a building for scientific use. As in Jaïpur, things are not always as they seem: here the staircase has no steps, and the door is simply a trace. The original name of the observatory is Yantra Mantra, or “the Temple of Formulas”— the ones you need to know to easily climb a wax ramp to open the door to the stars.
LE RÉEL ET SON DOUBLE
Tirée d’un rêve de l’artiste -en forme d’énigme donc, cette confrontation entre un corbeau et une colombe porte en elle un questionnement sur le jeu des apparences, à décrypter.
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Drawn from a dream of the artist— in the form of an enigma— this confrontation between a raven and a dove carries in it a questioning on the game of appearances to be deciphered.
CORPS & ÂME
« Dans ce flacon, voici l’amour du corps; dans cet autre, l’amour de l’âme; —Garde-toi de les confondre »
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“In this bottle, here is the love of the body; in this other, the love of the soul. Beware of confusing them.”
Séféris, Notes pour une semaine (samedi), 1933
OMPHALOS
Un cube de plâtre dont la face supérieure comporte une cavité, comme enfoncée dans son centre par sa propre matière. Cette cuvette figure la célèbre théorie de la relativité; ici la planète courbant l’espace-temps (tout au fond de cet entonnoir) est une bille de pierre du Néolithique qui faisait office d’obole, pour payer le passage d’une vie à une autre. Le titre en grec augmente cette possibilité: l’omphalos/nombril est celui de la naissance: c’est un centre autour duquel tourner, ou plonger.
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A plaster cube with a cavity on its upper plane, as if sunk into its own centre from its own material. This bowl represents the famous theory of relativity: here the planet bending space-time (at the very bottom of this funnel) is a stone ball from the Neolithic period that served as an offering to pay the passage from one life to another. The title in Greek increases this possibility: the omphalos, or the, navel is that of birth, it is a centre around which to turn, or dive.
LIVING IN THE MATERIAL WORLD
De cloches de cire aux battants de bronze pendent des cordes de chanvre -évocatrices de notre propre existence, à nous qui voulons sonner. Nous devons ainsi trouver le moyen de transformuter la cire en bronze, pour entendre enfin le son que nous sommes.
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Hemp ropes hang from wax bells with bronze clappers — evocative to us of our own existence — we who want to ring. We must find a way to transform the wax into bronze, to finally hear the sound that we are
COMPACT SPELL
Éloignée de la porte mais lui faisant face,une lente procession est en cours; un crocodile bitumé du Nil avance sur une traverse de chemin de fer, surélevée de barres de laiton. Il est Sobek, la divinité-crocodile du panthéon égyptien, dieu de l’eau et protecteur du soleil. Sa progression indiscernable n’en est pas moins inexorable, car il est aussi le dieu du temps, nous parlant de sa langue d’or, facétieuse.
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Far from the door yet facing it, a slow procession occurs: a crocodile from the Nile and covered in bitumen advances on a railroad tie, raised by brass bars. It is Sobek, the crocodile deity of the Egyptian pantheon, god of water and protector of the sun. His indiscernible progress is no less inexorable, for he is also the god of time, speaking to us with his facetious golden tongue.
THE BLACK LODGE (DR. FLUDD’S DESK)
« Through the darkness of future past,The magician longs to see One chants out between two worlds Fire walk with me »
Lynch/Frost, Twin Peaks
SEULS SIGNAUX
« J’ai tendu des cordes de clocher à clocher (...); des chaînes d’or d’étoile à étoile, et je danse »
Rimbaud, Les illuminations (XII)
Tels des stéthoscopes sont fixés des fils de cuivre sur une carte du ciel, en attente de capter des étoiles un message, un frémissement qui actionnerait le marteau de la cloche. La carte est réalisée avec la technique du cyanotype, comme un photogramme (voir NOX); ici les étoiles sont des météorites réduites en poudre que l’artiste a jeté au hasard sur la surface à insoler.
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“I have stretched ropes from bell-tower to bell-tower; garlands from window to window; chains of gold from star to star, and I dance.”
Rimbaud, Les illuminations (XII)
Like stethoscopes, copper wires are secured to a map of the sky, waiting for a message from the stars, a quiver that would activate the hammer of the bell. The map is made with the cyanotype technique, like a photogram (see NOX). Yet, here the stars are meteorites reduced to powder that the artist has randomly thrown on the surface to be exposed.
ZIGGOURAT
Si les abeilles sont les messagères du soleil, ceci est leur temple: sur cette ruche ancienne dressée comme une antenne, un entonnoir de laiton fait office de réceptacle des ondes lumineuses, ensuite transformées en pollen.
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If bees are the messengers of the sun, this is their temple: on this ancient hive set up like an antenna, a brass funnel acts as a receptacle for light waves, which are then transformed into pollen.
DEEP TIME
Le soleil est l’ombre de Dieu.
Michel-Ange
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Il n’a suffi que de deux moules à amulettes (Égypte, Basse Époque) pour relancer un atelier entier de production de céramique. La même terre qu’à l’époque antique a été employée, qui a pour couleur le fameux « bleu égyptien », susceptible de variations du bleu clair au graphite irisé, en passant par le vert.
Ces amulettes figurent le soleil à deux étapes de la journée, au lever (le scarabée Khepri) et au zénith (Rê-Horakhty, Horus-des-deux-horizons). L’installation murale les réunit donc dans une forme solaire, contenant deux structures concentriques: une frise d’Horus s’enroule dix fois autour d’un noyau de scarabées pareils à des bactéries primordiales.
Une édition limitée présente les amulettes séparément, chacune sur un disque d’or dont le diamètre est une mesure égyptienne équivalent à une main ouverte.
The sun is the shadow of God.
Michelangelo
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It took only two amulet moulds (Egypt, Late Period) to relaunch an entire ceramics workshop. The same clay that was moulded in ancient times has been reused here, giving these pieces the famous ‘Egyptian blue’ colouring, whose variations run from light blue to green to iridescent grey.
These amulets represent the sun at two moments of the day: the dawn (the scarab Khepri) and the zenith (Ra-Horakhty, Horus of the Two Horizons). This wall installation thus brings together the amulets in a solar form that contains two concentric structures: a frieze of Horus curls ten times around a core of scarabs that resemble primordial bacteria.
A limited edition presents the amulets separately, each mounted on a golden disk whose diameter corresponds to an Egyptian unit of measure based on the width of an open hand.
Eν Tò παν (LE UN EST LE TOUT)
Mais moi, je ramassais (…) des antiques momies le blé
Dans le noir abstrait, démentiel, et grain par grain
Je l’ai moulu, et lentement je l’ai fait cuire au four.
W.B.Yeats, Sur un centaure noir d’Edmund Dulac
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Quarante bouteilles de grès noir sont exposées au mur sur des tablettes recouvertes de nappes. Leur goulot fermé par de la cire suggère que leur ouverture doit être intentionnelle, et sera irréversible. Elles renferment en effet un liquide (de la bière) dont l’ingrédient principal n’est pas renouvelable: du blé du IIIe s. ap. J-C, prélevé par l’éminent égyptologue français Gaston Maspéro en 1884 dans la nécropole d’Akhmîm qu’il venait de découvrir.
Boisson la plus populaire à l’époque en Égypte, la bière était bue depuis des millénaires par toutes les classes sociales. Elle n’était pas destinée à être conservée, au contraire de celle que nous avons réalisée. Pour cette cuvée, le blé antique (de la plus ancienne espèce cultivée par l’humanité, « Triticum dicoccum ») a été mélangé à la même variété contemporaine et à des épices et du miel égyptiens.
Uniques aussi par leur fabrication, façonnées chacune par un céramiste, les bouteilles ont été marquées du symbole de l’« Ouroboros » (nom grec du serpent qui se mange la queue) enveloppant la phrase « Le Un est le Tout »; ce dessin provient d’un manuscrit de Zosime de Panopolis, auteur alchimique majeur et le premier dont l’existence est avérée. Coïncidence remarquable, ce dernier a probablement consommé de notre blé, car il a vécu à l’époque exacte et dans la ville même où la céréale a été semée.
Tel que Zosime l’énonce, « Tout s’enlace et tout se déplace. Tout se mélange et tout se recompose. Car la nature retournée se retourne elle-même. Tel est le caractère de l’excellence de tout l’univers et sa connexion. » Ainsi, par des voies impénétrables, s’accomplit le destin de ce blé récolté dans les années 200 et finalement transmuté en 2020.
yet I (...) gathered old mummy wheat
In the mad abstract dark and ground it grain by grain
And after baked it slowly in an oven
W.B. Yeats, On a Picture of a Black Centaur by Edmund Dulac
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Forty black stoneware bottles are exhibited on the wall on shelves covered with cloths. Their wax-covered mouths suggest that their opening must be an intentional – and irreversible – act. Indeed, these bottles enclose a liquid – beer – whose main ingredient is anything but renewable: wheat from the 3rd century A.D. that was recovered in 1884 by Gaston Maspéro, an eminent French Egyptologist, as he excavated the necropolis of Akhmim that he had just discovered.
A popular drink in ancient Egypt, beer was drunk for millennia by all the kingdom’s social classes. It was brewed for immediate consumption, whereas the bottles on display here will preserve their contents for years to come. For this batch, the ancient wheat “ triticum dicoccum”, the oldest to be cultivated by mankind) was blended with its contemporary equivalent and a mixture of Egyptian spices and honey.
The bottles, too, are unique: each one was handmade by a ceramicist and marked with the symbol of the Ouroboros (the Greek name for the snake consuming its own tail) that encircles the phrase “The One is All”. This drawing was copied from a manuscript by Zosimos of Panopolis, a major alchemist and the first whose existence is historically attested. In a remarkable coincidence, this author likely consumed the wheat on which this beer is based, since he lived in the area during the exact period that the grains were harvested.
EINE HANDVOLL SCHLAFKORN
Pourquoi j’éprouve tant de joie à dégager de la poussière ces cendres - et à les reverser aux millénaires dont je les ai extraites.
Pascal Quignard, Sur le jadis
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La matière première du brassage d’une bière, ou « drêche », est habituellement mise au rebut à la fin du processus. Ici, ce reliquat, mélange unique de blé antique et moderne qui a permis de réaliser la bière Ἓν τὸ πᾶν a en revanche été gardé et séché. Tel un cadeau du temps ou du rêve, il est comme tombé de l’image qui le surplombe, une photographie d’une fresque égyptienne représentant le vannage, où le blé est lançé en pluie dans l’air.
Why do I feel such joy as I sift these ashes from the dust –
and pass them back to the millennia from which I extracted them.
Pascal Quignard, Sur le jadis
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The raw material of beer brewing, the ‘distiller’s grains’, are usually thrown away at the end of the process. Here though, this leftover, the unique blend of ancient and modern wheat from which the beer Ἓν τὸ πᾶν was created, has been kept and dried out. Like a gift from time or from a dream, it appears almost as if it has fallen from the image that hangs above it, a photograph of an Egyptian fresco representing the process of winnowing, where wheat is tossed into the air.
LAMPES QUE LE TEMPS ALLUME
(…) comme si la chose la plus fraîche
pouvait être une flamme
un instant entre deux mondes
Philippe Jaccottet, Après beaucoup d’années
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LAMPES QUE LE TEMPS ALLUME
Une lampe à huile antique a été rallumée, le temps d’une flamme, puis éteinte. De cette action accomplie sans témoins, demeure la preuve « photographique » fixée sur une plaque de laiton poli.
(…) as if the freshest thing
could be a flame
an instant between two worlds
Philippe Jaccottet, After Many Years
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LAMPS LIT BY TIME
An ancient oil lamp has been lit once again, allowing its flame to burn briefly before being snuffed out. Of this act, carried out in private with no witnesses, all that remains is a sooty ‘photographic' trace fixed upon a plaque of polished brass.
QUOI ? L’ÉTERNITÉ ?
Tout ce que je regarde me regarde.
G. Bachelard, La Poétique de la rêverie
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Une coupe athénienne du Ve s. av. J-C, remplie d'eau et posée sur un plateau lumineux. En se penchant pour voir ce qu’elle contient, l’on tombe immanquablement sur son double — antique et vivant.
All that I see, sees me.
Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie
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An 5th century BC Athenian cup, filled with water and placed on a lightbox. Bending over to see what it contains, we inevitably come face to face with our double: ancient and living.
SUNSHINE REC.
Le Soleil, non seulement, comme le déclare Héraclite, est nouveau
chaque jour, mais sans cesse nouveau continûment.
Aristote, Météorologiques II,
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Il n'y a rien de si vieux sous le soleil.
Tout arrive pour la première fois, mais de manière éternelle.
J.L. Borges, La Chance
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Des tirages photographiques de la fin du XIXe siècle reproduisant des vestiges antiques ou des paysages naturels sont striés d’une ligne carbonisée.
Ce projet toujours en cours est né du détournement d’un héliographe ou « Sunshine recorder », appareil météorologique de mesure de l’ensoleillement qui utilise une sphère de cristal concentrant les rayons solaires pour brûler une feuille de papier.
Nous nous sommes rendus aux endroits mêmes où les photos ont été prises il y a 150 ans, pour capturer encore une fois la lumière.
Trois temporalités différentes sont donc révélées : une période antique, le moment où a été prise la photographie, et l’aujourd’hui continu, toutes trois sous le « même » soleil.
Au lieu d’observer un corps céleste à travers un télescope, ici la situation est inverse, et l’on se fait le témoin de l’action de notre étoile sur nous, tel Icare: le soleil apporte la vie, mais aussi, en concentré, la brûlure. Comme un instantané d’un moment lumineux, nous reste sa trace, la cicatrice.
The never ending happening
Of what’s to be and what has been
Just to be a part of it
Is astonishing to me
Bill Fay, The never ending happening
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So you run and you run to catch up with the sun but it's sinking
Racing around to come up behind you again.
The sun is the same in a relative way but you're older
Roger Waters, Time
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Historical photographs (c. 1880) of ancient buildings and of nature are marked with a scorched trace. In each case, this ‘scar’ was created with a heliograph, a meteorological instrument that registers solar intensity through ‘burning’ a piece of paper. A model of it was built especially for this project.
The process was carried out at the exact site where the photographs were taken, in order to record the "same sun" once again. The project hence required trips to Greece and Egypt. The final stage will include as well Italy (Rome, Pompei).
Is it not, after all, the same sun that shines upon us today that lit the men who built ancient temples and who took early photographs in the 19th century? If we shift to a ‘natural’ temporality, the length of time that separates us from the architects of the Parthenon suddenly seems insignificant. The burn marks left by the sun on the photograph is what links these moments; this link between different eras, between the past and the present, allows us to shrink – or even to temporarily and mentally elide – the distance that separates us from the past. In this way, we can borrow and rework the famous assertion of the Ecclesiastes: there is nothing old under the sun.